L'expert en économie, Hechmi Alaya, fondateur du Think Tank - TEMA, est revenu sur les faits marquants de l'année 2015 qui selon lui devrait au meilleur des cas, aboutir à une stagnation du PIB si ce n'est une réelle récession, et ce même si des expert s'accrochent encore à un taux de croissance entre 0,5 et 0,7%. A la lumière des dernières statistiques publiées par la Banque Central de Tunisie (BCT), le pays pourra difficilement éviter un repli de son PIB, indique Hachemi Alaya, invité de l’émission EcoMag sur Express Fm.
L'expert a mis l'accent sur l'environnement international, et la croissance économique faible des principaux partenaires commerciaux de la Tunisie dont la France qui devrait afficher moins de 1% cette année, outre l'environnement sécuritaire qui s'est fortement détérioré en Tunisie en 2015 et qui a même fait fuir les investisseurs locaux vers des destinations tel que le Maroc. La situation actuelle de l'économie tunisienne est une conséquence d'un cumul bien antérieur à la révolution, qui elle même n'est que le résultat de la crise de 2007-2008, rappelle Hachemi Alaya, qui déplore qu'il n'y ait pas eu en Tunisie de révolution économique au même titre que politique après l'essoufflement du modèle construit dans les années 70.
L'Etat tunisien pense toujours pouvoir diriger l'économie, contrôler la création d'emploi ou le taux de croissance, estime Alya, et poursuit la même politique économique qui n'a eu pour effet que d'accroitre les dépenses publiques, et par conséquent l'endettement. Le rôle de l'Etat se limite à fournir le bon climat pour l'activité économique et la création de richesses, poursuit l'expert, citant des exemples de son propre vécu, sur la philosophie sur la quelle est construite l'administration tunisienne, bien plus portée sur le contrôle et la surveillance que sur la stimulation et l'incitation à la création.
Pour 2016, Hachemi Alya relativise l'impact des grèves et des mouvements sociaux sur l'économie nationale, considérant qu'il s'agit d'un aspect normal dans la vie d'une démocratie, en revanche le plus préoccupant pour 2016 sera le régime des trois moteurs de l'économie, à savoir les exportations, la consommation et les investissements. Hachemi Alya rappelle qu'un taux de croissance de 1,7% est attendu pour la zone euro en 2015 mais aussi en 2016, on est donc loin de la perspective d'une vraie relance chez les premiers clients de la Tunisie, ajoute-t-il, ce qui n'augure pas d'une forte évolution des exportations tunisiennes, d'autant plus que les prix des phosphates et de l'huile d'olive (à supposer qu'on exporte les mêmes quantités qu'en 2015 ce qui est très improbable), sont attendus en baisse en 2016. Le tourisme tunisien restera très probablement en berne l'année prochaine, avec le risque sécuritaire qui s'est aggravé.
Par ailleurs, Hachemi Alaya met en avant la nouvelle approche du FMI dans sa relation avec la Tunisie, mettant la consolidation budgétaire (abaissement des dépenses publiques) comme condition pour l'octroi de nouveaux prêts d'appui. La consommation reste totalement tirée par la hausse des salaires déconnectée de la productivité, souligne Alaya, ce qui a détérioré la compétitive des produits tunisiens et le déficit de la balance commerciale par la hausse les importations. La consommation des ménages continuera d'être le principal moteur de l'économie tunisienne en 2016 après les récentes majorations salariales dans le public et prochainement dans le privé, selon Hachemi Alaya, il se pourrait même qu'elle génère un peu de croissance au premier semestre, mais impactera la croissance au 2S2016 négativement, du fait de l'inflation et de l'aggravation de la balance commerciale.
Pour ce qui est de l'investissement, les conditions qui ont engendré son recul sont toujours en place en Tunisie, qui n'a opéré aucune réforme profonde, même le code des investissements n'est toujours pas prêt, le PPP reste quant à lui soumis aux décrets d'application, rappelle l'expert, eux mêmes soumis à plusieurs aléas. Les investisseurs tunisiens eux mêmes continuent de fuir l'instabilité juridique et fiscale, rappelle l’expert, qui ne s'attend pas à de grands changements de ce coté pour 2016.
En conclusion, 2016 risque d'être dans la continuité du scénario tendanciel de 2015, et risque fort de se solder par une évolution négative du PIB, insiste Hachemi Alaya.
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