Le 31 décembre 2013, l'indice Tunindex bouclait, pour la première fois depuis son lancement en 1997, une série de trois années consécutives dans le rouge. Trois ans durant, l'humeur du marché a subi les multiples tourments qui ont marqué le pays et ébranlé la confiance des acteurs économiques. Il y avait donc fort à attendre de l'année 2014 qui s'annonçait particulière pour la bourse de Tunis et pour la Tunisie en général, du fait de l’agenda politique et la fin annoncée de la période de transition.
Performance Tunindex (2014) : 16,17% à 5089,99pts
Performance SFBT (2014) : 99,17% à 22,500 DT
Le premier constat de cette fin d’année est pour le moins positif, le Tunindex retrouve la bonne direction et parvient à couvrir une grande partie du creux formé sur ces dernières années, avec une hausse de 16,17% à fin 2014, à 5 089,99 points, bénéficiant d’importantes accélérations au lendemain des rendez-vous électoraux. Globalement, l’indice a été soutenu par ses principales locomotives à savoir les valeurs bancaires qui représentent 60% de la capitalisation boursière, et dont l’indice sectoriel affiche +15,3% annuels, mais aussi par la performance de poids lourds comme SFBT qui culmine à 99,17% de son niveau du début de l’année, et présente un poids prépondérant dans la composition du Tunindex. L’indice Tunindex 20 des valeurs les plus liquides, signe une hausse annuelle de 22,62% pour atteindre les 2149,76 points. La capitalisation boursière au 31 décembre s’est située à 16 541,5 MD contre 14 093 MD à fin 2013. Le rendement en dividendes du marché est estimé à 3,5% en 2014 contre 2,9% l’année d’avant.
Faible niveau moyen des échanges sur le marché central : 6 MD
En revanche, les professionnels se réjouissent beaucoup moins du niveau de la liquidité qui reste faible, avec une moyenne de 6 MD par séance sur le marché central, tout comme la présence étrangère et institutionnelle, hormis le CTKD qui poursuit sa politique de diversification avec les récents franchissements de seuils, entre autres dans Cerealis, Amen Bank, et TELNET.
L’autre faiblesse du marché aura été l’apaisement de l’enthousiasme sur le marché du papier neuf, avec seulement 6 introductions en bourse, contrastant sévèrement avec le record enregistré en 2013. Les levées de fonds dans le cadre de nouvelles introductions ont atteint un peu plus de 200 MD, bien loin des montants mobilisés un an plus tôt. La mobilisation d’une enveloppe conséquente de l’ordre de 959 millions de DT dans le cadre de l’Emprunt National a eu comme un effet d’éviction sur un marché dont la capacité d’absorption reste assez limitée.
Parmi les nouvelles opérations, une se détache, d’abord de par son envergure, à savoir celle de Délice Holding qui a ouvert 15% de son capital pour 120 MD. L’introduction sur la cote de la BVMT du groupe laitier a en plus diffusé les titres via une technique inédite sur le marché tunisien, celle de l’Offre à Prix Ouvert, un sucées pour la place de Tunis puisque l’opération a été souscrite 15,5 fois par plus de 15 700 souscripteurs. Le titre a ensuite évolué lentement et se contente d’une hausse de 3,77% depuis le début de son parcours boursier.
Une septième introduction en bourse devait avoir lieu, celle du groupe agroalimentaire Gepaco, qui distribue la marque Moulin d'Or, et qui a finalement opté pour un partenariat stratégique avec le groupe hollandais de logistique et de catering Supreme Group, qui entrera dans le capital à hauteur de 42%.
Indicateurs 3T14 : hausse globale de 10,2% des revenus en glissement annuel
Au niveau des sociétés cotées, la compilation d’indicateurs sur les neuf premiers mois de l’année fait état d’une hausse globale de 10,2% des revenus en glissement annuel avec une évolution positive des revenus de 63 sociétés cotées contre 11 baisses. Les PNB des onze banques cotées ressortent globalement en hausse de 7,2%, les huit sociétés de leasing ont vu leur revenus nets de leasing gagner 11,16% dans le même intervalle, le revenu global des trois sociétés d’investissement cotées a progressé de 13,61%. Le secteur industriel a signé la meilleure progression en termes de revenus, soit 26,8%.
Sur la cote, le grand gagnant en 2014 aura été le titre SFBT, avec un rendement de 99,17% sur l’année. La majeure partie de cette hausse est venue consécutivement à l’apparition du décret N°3629 du 18 septembre, dont beaucoup de spéculateurs y ont vu une dispense pour les étrangers d’une autorisation préalable de la Commission Supérieure des Investissements pour monter dans le capital des sociétés tunisiennes, au-delà des 50% et dans la limite des 66%. Ce mouvement d’anticipation quant à l’inclusion de la SFBT dans cette décision a propulsé le titre de plus de 30% en un peu plus de deux mois. Les volumes dirigés sur SFBT ont dépassé les 94 MD cette année, contre 31,5 MD en 2013. Sur le plan opérationnel, les performances de la SFBT qui a dégagé un bénéfice de 77,538 MD au premier semestre restent conformes à celles des années précédentes.
L’autre vedette de la cote était Euro-cycles, le cinquième fabricant mondial de bicyclettes commence à s’imposer sur la bourse et susciter l’intérêt des investisseurs. Le titre a gagné 72,74%, offrant l’un des rendements de dividendes les plus élevés de la cote après avoir distribué 0,750 DT par action en mai dernier.
Attijari Bank termine le trio de tête, en s’adjugeant 57,93%. La banque a aussi opté pour une politique de rémunération généreuse pour compenser ses actionnaires de leurs longues années d’attente. La nouvelle dynamique de croissance de la banque se matérialisant par une progression organique de son PNB de 12,7% entre 2008 et 2013 la place dans un registre particulier par rapport aux autres banques. Continuant sur sa lancée, BIAT finit l’année sur une performance boursière remarquable de 34,51%. Le mastodonte du bancaire tunisien est le plus performant du secteur privé avec un résultat net de 79,8 MDT après effet des provisions additionnelles et 106 MDT hors ajustement comptable. La nouvelle circulaire de la banque centrale sur les provisions additionnelles a ainsi crée un arbitrage favorable aux banques privées qui affichent les taux de couverture les plus conformes aux exigences de la BCT. Seule banque du secteur publique qui a relativement su résister, la BNA a effacé ses débâcles boursières de début d’année pour finir sur un rendement de -2,56%. Le groupe bancaire affiche un résultat après modifications comptables négatif de -37,384 MDT alors que la STB (-4,22%) a clôturé l’exercice 2013 sur un déficit historique de l’ordre de -571 MDT. Le full audit devrait aboutir à des besoins de recapitalisation des trois banques publiques qui pourraient peser pour plus d’un milliard de DT dans le budget de l’Etat.
Syphax Airline : Lanterne rouge du marché à fin 2014
Le titre Syphax Airlines fait figure de dernier de la classe et subit de lourdes sanctions par le marché. A la tête du management, l’instabilité était de mise, d’abord la démission de Mohamed Frikha pour cause d’engagement politique, et son remplacement par Christian Blanc qui n’a pas fait long feu à la tête de la compagnie, cédant sa place à la suite d’un imbroglio juridique avec l'Office de l'aviation civile. Quelques semaines auparavant, le titre était suspendu sur décision du CMF pour la non publication des états financiers au 30 juin, et pour des « anomalies comptables et organisationnelles de Syphax Airlines qui pourraient, éventuellement, avoir un impact sur la situation financière de la société et sur le cours de la valeur".
Le titre UBCI a aussi été dans la tourmente avec deux reports de son AGO non encore tenue jusqu’à cette date, affectant son rendement sur l’année qui ressort limité à 2,01%. La filiale de la BNP est au centre d’un débat houleux entre les administrateurs tunisiens et français sur le montant de l’indemnité qui devrait être payée par la société mère pour compenser les montants exagérés des prestations de services informatiques facturées à la partie tunisienne. Le ministère des finances s’y est mis avec La banque centrale pour réévaluer le risque fiscal de la banque.
Pour l’année 2015, la bourse de Tunis continuera évidemment à surveiller l’évolution de la conjoncture politique, reste à espérer que l’avènement d’un gouvernement stable pour cinq ans rétablira une meilleure visibilité pour les investisseurs, et que les autorités poursuivront les efforts pour améliorer l’attractivité du marché financiers qui contribue toujours faiblement au financement de l’économie, dans une proportion ne dépassant pas les 7%. Certains analystes pointent du doit les dispositions de la loi de finances 2015 instaurant la taxation des dividendes reçus qui risque d’affecter le niveau de l’épargne à long termes.