La Banque Mondiale a publié un rapport sur l'emploi en Tunisie, qui propose une vue d'ensemble des principaux défis auxquels fait face le pays aujourd'hui en matière de marché du travail et de croissance. Le rapport estime que le principal facteur de la mauvaise performance de l'emploi est la faible croissance économique, qui aura été une caractéristique constante de la décennie post révolution de 2011. L'étude met en évidence plusieurs faits marquants. Premièrement, moins d'une personne sur deux en âge de travailler participe activement au marché du travail, c'est-à-dire qu'elle est soit employée, soit à la recherche d'un emploi. Deux groupes en particulier se distinguent par leurs faibles taux de participation et d'emploi : les femmes et les jeunes. Deuxièmement, une part importante des travailleurs sont employés de manière informelle, c'est-à-dire qu'ils n'ont pas accès à la couverture sociale, ou qu'ils gèrent des entreprises non enregistrées auprès des autorités fiscales ou d'autres procédures officielles de comptabilité publique. Troisièmement, les rendements de l'éducation sont considérables en Tunisie par rapport aux autres pays à revenu moyen et élevé. En 2019, l'enseignement supérieur a généré un rendement de 26,1 % par rapport à l'enseignement secondaire. En outre, les rendements de l'enseignement supérieur sont considérablement plus élevés dans le secteur public et ont augmenté au fil du temps, alors qu'ils ont diminué dans le secteur privé. Cela soulève la question de la durabilité de la croissance des salaires dans le secteur public.
L'analyse présentée dans le rapport tire parti de plusieurs sources de données produites par l'Institut national de la statistique (INS) de Tunisie, notamment des données à usage public, à usage restreint et des rapports publiés par l'INS à partir d'enquêtes sur les microentreprises et du registre national des entreprises.
La Banque Mondiale estime qu'en Tunisie, le capital humain est sous-exploité : plus d’un Tunisien en âge de travailler sur deux est sans emploi
et ne cherche pas de travail. La population en âge de travailler, âgée de 15 ans et plus, comprend 8,7 millions de personnes (76 % de la population totale) qui peuvent contribuer de manière productive à l’économie (2017) (voir Graphique 2.10). Environ 47 % de la population en âge de travailler est active sur le marché du travail, et 53 % n’est ni employée ni à la recherche d’un emploi, ce qui correspond à 4,6 millions de personnes. Parmi les inactifs, plus de 8 sur 10 (soit 3,7 millions de personnes) ne sont pas non plus aux études. Le taux de participation au marché du travail en Tunisie est supérieur à la moyenne de la région MENA (43,2 % en 2017, à l’exception des pays à revenu élevé), mais considérablement faible par rapport à la moyenne des pays à revenu intermédiaire (64,9 % en 2017).
Le rapport montre que la participation des femmes au marché du travail est inhabituellement faible, en particulier chez les femmes peu instruites. Moins de 3 femmes sur 10 participent au marché du travail. À 26,5 %, contre 68,3 % chez les hommes (2017), la participation des femmes au marché du travail a augmenté modestement au cours de la décennie (24,4 % en 2006) (voir Tableau 2.2). La participation des jeunes a également été inférieure à la moyenne, en grande partie grâce à l’augmentation des inscriptions dans l’enseignement secondaire et supérieur. Le taux d’activité des personnes
n’ayant pas fait d’études était exceptionnellement bas. En 2017, leur taux de participation au marché du travail était estimé à 18,1 %, contre 24,7 % en 2006. Cette situation était principalement attribuable aux femmes de 30 à 44 ans et de 45 à 64 ans n’ayant pas fait d’études.
Le document souligne qu'une majorité croissante de travailleurs (environ 80% en 2017) occupe des emplois à rémunération moyenne ou faible. Entre 2006 et 2017, le nombre et la part des professions à forte rémunération (cadres, spécialistes, techniciens et assimilés) ont diminué de 3,8 % (27 000) en raison d’une réduction du nombre de cadres et de techniciens, tandis que le nombre de spécialistes a augmenté considérablement (Tableau 2.3). Le nombre d’employés dans les professions de niveau intermédiaire a augmenté de près de 222 pour cent (370 000) grâce à la croissance du nombre de travailleurs dans les services et la vente ainsi que dans l’artisanat et le commerce. Le nombre de travailleurs dans les métiers élémentaires a augmenté d’environ 17% (99 000). Dans l’ensemble, le nombre de professions à forte rémunération a diminué, passant de 24 % à 20 %, et la part des professions de niveau intermédiaire a augmenté d’environ 3 points de pourcentage pour atteindre environ 60 % en 2017.
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