La Bourse en 2021 : Un parcours dicté par la politique et la COVID-19 ; Incertitude pour 2022

Au milieu du marasme économique et sanitaire mais aussi d’un relatif retour de l’optimisme, la Bourse de Tunis a connu une année de rebondissement, qui a plutôt bien démarré. Les valeurs reines du marché, et en premier lieu les bancaires ont porté le Tunindex dans son ascension encourageante une bonne partie de l'année, elles-mêmes appuyées par la levée des conditionnée de la suspension de la distribution des dividendes relatifs à l’exercice 2019 et décidée en 2020. Globalement, la relative reprise pour une majorité de sociétés cotées a relancé l’appétit des investisseurs.

Pourtant le bilan sur l'ensemble de l'année apparait moins enthousiasmant : le Tunindex qui affichait plus de 8% sur les cinq premiers mois de l'année, se contente finalement d'un rendement annuel de 2,34%. Sur les derniers mois, la situation sanitaire incertaine, l'atmosphère affligeante sur le plus politique, et un cadre macroéconomique morose ont rejailli sur la place tunisienne. Des coups durs, comme les dégradations des notes tunisiennes par Fitch et Moody's ont remis au premier plan la forte dégradation persistante de la santé économique du pays. Au deuxième semestre, les gains du Tunindex ont fondu : une baisse de 5,29% a replacé le Tunindex juste au-dessus des 7000 points et les évènements du 25 juillet ont davantage dégradé l'humeur du marché. Par secteur, l'indice des banques a vu ses gains atténués, pour finir l'année avec +4,15%, contre une baisse de 18,45% en 2020. Les valeurs industrielles ont, en revanche, vu leur indice plonger de 10,7% en 2021, contre une progression de 22,55%. On pouvait pourtant s'attendre à mieux pour les valeurs industrielles, avec les perspectives d'une relative normalisation de l'activité des sociétés après une année 2020 infernale, marquée par les restrictions, les pénuries de matières premières et l'effondrement de la logistique à travers le monde, qui a conduit à plusieurs reprises à une vraie paralysie pour l'approvisionnement.

Bien que très modeste, la hausse annuelle du Tunindex intervient après deux années dans le rouge, soit 3,33 et 2,06 respectivement en 2020 et 2019. A noter que le Tunindex, a enregistré une baisse de 4,75% estimé en dollar. A l'opposé, estimé en Euro, le baromètre la BVMT s’est apprécié de 3,80%.

Parmi les faits marquants de l'année 2021 figure le transfert des titres négociés sur le marché alternatif vers le marché principal, en attendant une nouvelle version pour le marché alternatif, réservée aux sociétés qui ont choisi l’accès à ce marché par l’admission à la négociation de leurs titres au moyen d’une augmentation de capital sans recours à l’appel public à l’épargne, ou dans le cadre d’une cession des participations détenues par les acteurs du capital risque.

Il a également été décidé de mettre en place, à partir de juillet, un nouveau compartimentage pour le marché principal. Le compartiment A a été réservé aux capitalisations boursières supérieures ou égales à 200 MD, le B regroupera les sociétés dont la capitalisation boursière est inférieure à 200 MD, et le compartiment S, pour les sociétés exposée aux risques de perturbation durable de leur bon fonctionnement, ou qui manquent à leurs obligations en matière de communication avec le marché.

Le 30 août, la Bourse de Tunis a mis en production sa nouvelle plateforme de cotation Optiq®, développée par EURONEXT. Elle offre notamment de nouvelles fonctionnalités qui pourront répondre aux futurs besoins du marché financier Tunisien, notamment la création de nouveaux marchés et de nouveaux instruments financiers.

Globalement, durant l’année 2021, le volume global des échanges sur la Bourse de Tunis a enregistré un repli de 8% pour atteindre 2 585MD contre 2 807MD en 2020. Les volumes échangés sur la Cote de la Bourse ont accaparé 64,7% du volume global des échanges, 2,3% sur le Hors-Cote et 33% pour les enregistrements et les déclarations.

Prise séparément, la cote de la Bourse a connu une hausse de 6,9% des capitaux traités par rapport à 2020, avec un volume moyen journalier de 6,7 MD, contre 6,3 MD.

Les transactions de blocs ont représenté une part de 37% du volume des échanges sur les titres de capital et une part de 34% sur la Cote de la Bourse, soit 573MD contre 238MD en 2020. Quant à la part des transactions sur les titres de créances, elle a représenté 7% du volume traité sur la Cote, soit 117MD en 2021 contre 164MD en 2020.

En 2021, le montant global des émissions réalisées par les sociétés cotées et autorisées par le Conseil du Marché Financier (Fin novembre 2020) a atteint 508MD pour 14 opérations. Ce nombre est réparti entre 8 emprunts obligataires qui ont porté au total sur 447MD, un Emprunt obligataire émis selon les principes de la finance islamique pour un montant de 10MD et 5 augmentations de capital pour 51MD.

D'un autre coté, l'ensemble des parts détenues par les étrangers est tombé de 25,25 à 23,10% entre 2020 et 2021. Les étrangers n'ont acheté que pour 53,5 MD contre des cessions de 330,7MD en 2020.

Comme l'année précédente, 2021 a été avare en nouvelles introductions, avec une seule IPO, celle de Smart Tunisie, avec une capitalisation boursière de 184,4 MD le jour de l’introduction qui ramène à 80 le nombre de sociétés cotées, après la radiation en janvier des actions de la STEQ. A la fin de l'année, la capitalisation boursière du marché a carrément stagné par rapport à 2020, avec une très légère baisse de 0,74%, limitée par la bonne tenue de certains poids lourds. La capitalisation boursière reste dominée à hauteur de 43,2% par les sociétés financières ; le top 10 représente 62,6% du total.

Les valeurs les plus performantes durant l’année 2021 sont STIP qui a clôturé l’année avec un rendement de 171,74%, suivi d’ARTES avec 70,2% et SIPHAT avec 45,8%. En revanche, la baisse la plus importante a touché les titres UADH, GIF et SERVICOM qui se sont dépréciés respectivement de 86,3%, 62,0% et 53,2%.

Ainsi, la Bourse de Tunis aura connu le bon et le moins bon en 2021 pour aboutir à une performance décevante, et aborde 2022 plus que jamais dans le doute. La résurgence de la pandémie COVID-19 et l'apparition du nouveau variant Omicron a remis le monde entier sur la défensive, et certains pays recommencent à se barricader. A près la détente portée par les campagnes de vaccination, la menace du retour à une période sombre faite de restrictions et de limitations de mouvements pourrait fortement affecter le comportement des investisseurs.

D'un autre côté, l’environnement politique très particulier depuis le 25 juillet pourrait favoriser la prudence sur le marché. La consultation populaire censée donner des indices sur la nouvelle direction du cadre politique en Tunisie débutera dans les prochains jours et se heurte à de vives contestations, ce qui ne manquera pas d'alimenter le doute.

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