La crise financière et économique internationale domine les
esprits. Les investisseurs s’interrogent sur le degré d’exposition de l’économie
tunisienne et sur l’impact qu’elle pourrait subir. Clairement, la baisse de
l’activité économique en Europe ne peut pas ne pas avoir d’impact sur une
économie largement ouverte sur l’extérieur, avec des exportations qui
représentent 50% du PIB. Les derniers chiffres de l’Institut de la Statistique
montrent à partir du dernier trimestre 2008 un ralentissement de la croissance
de la production industrielle tunisienne, et notamment de celle des entreprises
exportatrices. La demande interne montre également certains signes de
fléchissement, les immatriculations de voitures sont ainsi en recul sur le
dernier trimestre, et la demande de biens immobiliers est aussi en nette chute
selon les professionnels.
La revue « Etudes Economiques » de BNP PARIBAS publiée il y a
quelques jours, estime que la demande adressée en 2009 aux économies émergentes
(dont fait partie la Tunisie) devrait être en baisse de 3 à 5% en volume ; et
que les prix des matières premières baisseraient de 50% pour le pétrole et de 25
à 30% pour les matières premières non pétrolières. Cette analyse prévoit
également une contraction des flux de capitaux privés étrangers vers les pays
émergents, qui avaient surtout concerné dans le passé le secteur énergétique.
Dit autrement, moins d’argent viendra de l’étranger pour financer les économies
des pays en développement du fait de la crise de liquidités à l’étranger.
Après une croissance en volume de 6,5% en 2007, et de 4,2% en
2008, il est donc probable que la croissance de 2009 se situe à un niveau
inférieur ; et la publication des indicateurs d’activité du 1er trimestre des
entreprises tunisiennes cotées pourrait même montrer des chiffres d’affaires en
recul pour certaines d’entre elles. A ce niveau, il faut souligner le phénomène
exceptionnel que constitue la chute des prix des matières premières (pétrole,
aluminium, plomb, cuivre….). Pour certaines entreprises, cette chute va avoir
une répercussion positive sur leurs achats; et la baisse de leur CA n’impactera
pas mécaniquement la rentabilité de ces dernières. Dans certains cas, l’effet
global de ces deux évolutions pourrait même se traduire par des bénéfices nets
en progression. C’est donc avec discernement que les investisseurs devront lire
les publications trimestrielles des sociétés cotées en ce début 2009.
Quant aux banques commerciales tunisiennes, qui représentent
plus de la moitié de la capitalisation de la Bourse de Tunis, la baisse récente
– et importante- des taux courts (75 points de base) va affecter leur marge
nette d’intérêt. Toutes choses égales par ailleurs, cette marge nette d’intérêt
pourrait baisser de 15% impactant directement leur PNB, dont elles représentent
la principale source.
Toutefois, en aval du PNB, la couverture des créances classées
par les provisions, qui avait lourdement ponctionné la rentabilité des banques,
s’est nettement améliorée, certaines banques atteignant déjà l’objectif de 70%
fixée par la Banque Centrale comme niveau à atteindre en 2009. Cette évolution
va se traduire par des dotations aux provisions relativement moins importantes,
et ouvre des perspectives favorables pour les bénéfices des banques.
L’environnement dans lequel opèrent aujourd’hui les entreprises
tunisiennes est plus aléatoire, plus difficile à interpréter, avec des
évolutions rapides au niveau de la demande, des prix de vente et des achats, des
taux de change et d’intérêt. C’est dans ce contexte compliqué et volatile que
les investisseurs doivent fonder leurs décisions d’investissement, et les
analystes leurs recommandations. Les deux sont appelés aujourd’hui à un
impératif d’analyse approfondie sur les fondamentaux des entreprises et sur leur
environnement, et à une estimation plus fine des risques.