Le siège de la Bourse de Tunis a accueilli aujourd'hui, 24 juin 2016, une communication financière organisée, après plusieurs années d’absence, à l'initiative de la direction Générale de la BNA et à sa tête, Habib Bel Hadj Gouider, une rencontre qui se veut un nouveau point de départ en matière de communication pour la banque, a indiqué son président lors de son mot d'ouverture. Bel Hadj Gouider s'est d'ailleurs félicité des progrès de la BNA à ce niveau, notamment la publication à temps des indicateurs périodiques en 2016, ce qui n'est pas une mince affaire, a-t-il affirmé, compte tenu des carences dont souffre la BNA en matière de système d'information, avec la présence de trois systèmes séparés. La communication intervient après l'adoption au mois d'avril de la version finale du Business Plan après une première version établie en octobre 2015 sur la base des conclusions du full audit entamé en 2014.
Bel Hadj Gouider a tout d'abord exposé quelques éléments du diagnostic de la banque et une vue d’ensemble sur sa situation, avec aujourd'hui 170 points de vente, dont une quarantaine sur le grand Tunis, très loin de certains établissements concurrents qui dépassent les 80 agences dans la capitale et alentours. Mais, la BNA se démarque par une présence dans des zones a faible densité (mois de 100 par km2). Au niveau de son positionnement, la BNA est aujourd'hui 2 ème en termes de dépôts avec une progression de 6,5% en 2015 à 6278 MD, et 1ere de la place en termes de crédit avec un encours global de 8117 MD à fin 2015 (-3,9% vs 2014), les particuliers représentant 15% des engagements et le secteur privé 72%, les entreprises publiques représentent quant à elle 13% et apparaissent comme le talon d'Achille au vu de leur profil de risque, la question est d’ailleurs revenue à plusieurs reprises au cours de la rencontre, Habib Ben Hadj Gouider a même qualifié certaines entreprises publiques de bombes à retardement, desquelles il faudra tôt au tard se désengager. Les traités de garanties convenus avec l'État ont servi à mitiger le risque. Concernant les offices des céréales, de l'huile et OCT, il s'agit de retards de remboursement plutôt que des problèmes d'impayés. La démarche commerciale vis à vis de ces institutions obéit à la loi de marché en termes de tarification. Aucune autorité n'est intervenue pour leur accorder un quelconque avantage. Notons qu’à fin 2015, la banque affichait l’un des taux de créances classées les plus élevés du secteur, à 24,76% contre 21,04% en 2014, soit une hausse en volume de 369 MD ou 18,9%. Le taux de couverture s’est quant à lui situé à 57,38% contre 58,47% en 2014. De telles évolutions dues à l'apparition de nouveaux risques semblent surprendre plusieurs observateurs dont beaucoup se rappellent les propos rassurants de l'ancien PDG qui a réfuté tout besoin de la banque pour une recapitalisation.
La banque a finit l’année 2015 avec des produits d’exploitation de 619,9 MD, en progression de 3,9% comparés à l’exercice 2014, une progression toutefois freinée au quatrième trimestre consécutivement à la baisse du TMM et la réservation des intérêts des entreprises en difficulté, avec un effet ciseaux estimé à 10 MD, selon le dirigeant. La marge d’intérêt s’est ainsi inscrite en baisse de 11% à 220,6 MD. En 2015, les commissions ont représenté 15 à 16% des revenus, une autre faiblesse soulignée par le PDG, la moyenne du secteur se situant aux alentours de 21%, il y a des niches d’améliorations importantes à ce niveau estime Gouider. La Marge sur commission a quasiment stagné en 2015, à 54,2 MD. Les charges d’exploitation bancaires ont pour leur part connu une progression de 14,8% à 284,6 MD. La banque a ainsi dégagé un produit net bancaire en repli de 3,9% à 335,3 MD, le deuxième de la place. Notons que le Full Audit avait révélé un retard de 25 à 30% du PNB par agence de la BNA comparé au premier de la classe, a affirmé Gouider, en réponse à un intervenant. A fin 2015, le volume des dotations nettes aux provisions pour le risque de contrepartie s'est élevé à fin 2015 à 102,2 MD contre 105,7 MD à fin 2014. Le résultat net de la banque s’est établi à 25,4 MD contre 50,8 MD un an plus tôt.
Le management de la BNA a ensuite présenté le Business Plan, approuvé en avril 2016, dans sa version mise à jour après une première version établie en octobre 2015 et sur la base des conclusions du full audit, conclusions dont Bel Hadj Gouider s’est dit favorable à la publication après l’accord du conseil d’administration.
Au volet organisationnel, la BNA a ainsi mis en place un cahier de charges pour une réorganisation, a expliqué Habib Bel Hadj Gouider. Parallèlement, la BNA s'attaquera à ses défaillances en matière de système d'information, et prévoit le lancement fin 2016 d'une étude pour le choix d'un global banking, qui sera implémenté dans 3 à 4 ans, a indiqué le PDG, et ce moyennant une enveloppe de 65 MD. Pour rattraper son retard en matière de coefficient d'exploitation et de productivité des facteurs de production, BNA doit se doter de moyens informatiques modernes pour ses trente prochaines années. Une sorte de transformation digitale.
Le plan d'action de la banque touchera par ailleurs les aspects commercial et RH, avec le lancement d'objectifs par segment, de grilles de motivation et la mise en place de plans de développement personnalisés. L'intéressement variable du personnel sera un élément incitatif clé.
Côté chiffres, Bel Hadj Gouider prévoit une hausse moyenne de 5% des concours de crédits entre 2016 et 2020 contre une croissance des dépôts qui tournera de son côté autour de 8% sur la période du BP. Le ratio actuel de liquidité à 48% appelle donc a un tel effort de collecte. Le PDG n'a pas caché ses intentions de réduire la voilure pour bien piloter les profils de risque. La correction de la trajectoire de certains ratios (CDL, Taux de couverture des risques, ratio de solvabilité principalement) nécessite cette attitude prudente. Les produits d'exploitation évolueront selon un TCAM de 7,9%, et les charges d'exploitation de 6,2%. Au niveau du PNB, la banque table sur une hausse moyenne de 9,3% pour atteindre 374,3 MD, puis 402,8 MD à fin 2017 et 545,9 MD à l'horizon 2020. Gouider a annoncé que la banque poursuivra la cession des actions SFBT à hauteur de 111,6 MD en 2016 et 111,6 MD également en 2017, une discussion sera néanmoins tenue au niveau du conseil d'administration pour étudier la possibilité d'une cession groupée en une seule fois. Au niveau du résultat net, la banque vise les 128,5 MD à fin 2016, compte tenu de la plus value sur SFBT, tout comme en 2017 ou le résultat net est attendu à 140,9 MD, il se situera ensuite à 46,5 MD en 2018, puis 78,2 MD en 2019, pour atteindre 108,1 MD en 2020.
Un dernier mot à dire sur cet acte communicationnel louable, fait rarissime pour une banque publique, le nouveau PDG de la plus grande publique Tunisienne, a fait bonne impression auprès de ses auditeurs jouant la carte de la transparence. Venant du secteur privé, et tout ce que cela sous-tend comme méthodes de gestion et processus de décisions modernes et efficients, il devra faire face aux contraintes du secteur publique. Seul l'État peut faciliter le redressement de la banque.