Le webinaire organisé mardi 11 janvier 2022 par le Conseil des Chambres Mixtes (CCM) sur le thème : Impact de la loi de Finances 2022 et nouvelles Dispositions Fiscales a permis d’apporter un nombre d’éclairages sur certaines dispositions contenues dans la loi, notamment les articles 52 et 66, sur le champ d’application de certaines mesures, sur les incitations en matière d’investissement et d’épargne ainsi que sur le contexte dans lequel ce texte a été élaboré.
Ce webinaire qui a enregistré la participation de pas moins 270 personnes a été animé par la Ministre de Finances, Mme Sihem Boughdiri et par le Directeur général des études et de la législation fiscale, M. Yahya Chemlali, a été une opportunité pour lever beaucoup d’équivoques.
Tout en reconnaissant que cette loi, promulguée par le décret-loi numéro 21-2021 du 28 décembre 2021, n’était pas la meilleure loi de finances possible, Mme Sihem Boughdiri estime néanmoins qu’elle a été l’une des premières lois de finances à ne comporter aucune nouvelle mesure fiscale grevant les entreprises. Au regard des difficultés économiques que connait le pays, notamment la crise des finances publiques, cet exercice n’a pas été de toute facilité. Le résultat final, dit-elle, est respectable dans la mesure où dans ce processus compliqué de recherche d’équilibre budgétaire, le gouvernement n’a pas eu recours à l’augmentation du niveau d’imposition des entreprises avec un IS (impôt sur les sociétés) de 15%.
Mme Donia Hedda, Présidente du Conseil des Chambres Mixtes (CCM) a tenu à relever le poids des chambres mixtes dans le pays (17 chambres), qui se décline à travers l’existence de 3500 entreprises mixtes employant environ 320 mille personnes et son implication, à travers une task force constituée dans la réflexion sur les problèmes économiques et d’investissement dans le pays. L’organisation du débat sur la loi de finances 2022, a estimé Mme Hedda, découle de l’importance cruciale que revêt ce texte sur l’économie du pays en général et sur les entreprises en particulier.
Tout en donnant un aperçu sur les différents indicateurs budgétaires qui ont servi pour élaborer cette loi, Mme Boughdiri a précisé que plusieurs hypothèses ont été prises en considération, à savoir notamment la réalisation d’un taux de croissance du PIB de 2,6%, un baril de pétrole de 75 dollars et, surtout, la conclusion d’un accord avec le Fonds Monétaire International.
Avec un déficit budgétaire de 6,7% prévue, et compte tenu de ressources propres estimées à 38618 MD, des dépenses de subvention qui s’élèveraient à 7262 MD, le pays est contraint à mobiliser 19.983 MD sous forme de ressources d’emprunt, ce qui porterait le taux d’endettement public à 82,6% du PIB, soit l’équivalent de 114142 MD.
Le Directeur général des études et de la législation fiscale, M. Yahya Chemlali a de son côté passé en revue les grands axes autour duquel s’articule ce texte. Il s’agit notamment du soutien des institutions économiques et l’encouragement des offres d’emploi, l’amélioration du climat des affaires et l’encouragement des projets d’investissement, l’encouragement des projets portant sur l’économie verte et le développement durable, la lutte contre la fraude fiscale et l’intégration de l’économie parallèle dans les circuits organisés, la généralisation de la numérisation de l’administration, le renforcement des mesures sociales au profit des catégories vulnérables et à faibles revenus ainsi que le secteur de la santé et l’encouragement de l’économie sociale et solidaire.
Ce webinaire a offert surtout l’opportunité de fournir des réponses à propos des mesures qui ont suscité inquiétudes et questionnement. Il s’agit particulièrement de l’article 52 qui vient annuler le régime suspensif de la TVA pour les sociétés de commerce international et les entreprises de services exportatrices. Cette disposition a été accueillie avec scepticisme dans la mesure où pour lutter contre la fraude d’une minorité, on a mis au point un mécanisme qui condamne tout le système et surtout des chefs d’entreprises qui participent au processus d’exportation et de création de richesse. Sur ce plan, la ministre des finances a précisé que ledit article introduit une modification d’une technique d’octroi de cet avantage dont le bénéfice est donné à la sortie et non plus à l’entrée. Tout le problème, indique la ministre, réside dans le suivi des montants importants de TVA octroyés ajoutant qu’une étude est en cours sur les modalités d’application du régime suspensif. M Yahia Chemlali a confirmé que les délais de remboursement de la TVA seront réduits au maximum et que les vrais exportateurs ne vont pas perdre cet avantage et leurs trésoreries ne seront pas affectées par cette mesure qui constitue le premier exercice dans le processus de démantèlement du régime suspensif.
L’article 66 relatif à l’ « amnistie cash » qui mentionne que les revenus d’activités des personnes physiques non déclarées, à condition de les déposer dans un compte bancaire ou postal avant le 1er juillet 2022, sont soumis à un impôt libératoire de tout impôt et taxe de 10%, a suscité des interrogations quant aux modalités de sa mise en œuvre. Il est à noter que ces revenus ne devraient pas provenir d’une source illicite au sens de la loi relative à la lutte contre le terrorisme et à la prévention du blanchiment d’argent. L’accent a été mis sur la nécessité d’instituer une véritable coordination avec les banques qui recourent dans pareils cas à une déclaration de soupçon, pour conférer à cette mesure tout son sens. Cette amnistie cash, précise la Ministre, est purement fiscale. Pour en bénéficier, les personnes concernées doivent fournir la preuve que les sources de ces revenus ne sont pas douteuses.
L’autre question posée par un certain nombre d’intervenants concerne l’absence de mesures d’encouragement à l’investissement notamment étranger et d’amélioration d’attractivité du site Tunisien des affaires. Mme Boughdiri a fait savoir que la loi de finances 2022 comporte de mesures d’encouragement significatifs pour l’impulsion de l’investissement qui profitent aux entreprises. Elle a cité à ce propos la réévaluation des actifs des biens fonciers bâtis et non bâtis qui peuvent être réévalués à leur valeur réelle sans que cela ne dépasse une valeur calculée sur la base d’indices, à publier dans les jours à venir.
Enfin, pour ce qui concerne la digitalisation de l’administration fiscale, M Chemlali a précisé que la digitalisation du certificat de retenue à la source entrera en vigueur d’une manière graduelle au fur et à mesure du solutionnement des problèmes techniques de la plateforme dédiée à ce sujet.
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