Le département recherche et études de Tunisie Valeurs vient de publier la revue de l'intermédiaire en Bourse du mois d'octobre 2018, consacrée en partie aux perspectives de l’économie tunisienne, à la situation du secteur bancaire, avec en prime un flash boursier pour le premier semestre 2018, et enfin, un focus sur une sélection de valeurs, dont la STAR, Euro-Cycles, LILAS et UNIMED.
S’agissant de la conjoncture économique et des perspectives post-révolution, Tunisie Valeurs note que la transition tunisienne ne se fait pas sans difficultés du fait de la persistance de l’instabilité politique, des résistances sociales et corporatistes et des difficultés économiques marquées par un effondrement de la croissance en 2011 et une très grande fragilité depuis.
Le choc économique dévoilé post janvier 2011 n’a fait que mettre en avant les véritables défaillances structurelles du système tunisien liées au modèle même de l’économie et amplifiées par un environnement local et international difficile.
La Tunisie souffre aujourd’hui d’une dérive dans la gestion de ses finances publiques et de sa situation extérieure à travers la dégradation du déficit courant. Ces déficits jumeaux - conjugués au rythme lent d’exécution des réformes - sont parmi les risques qui peuvent compromettre les perspectives à moyen terme de la Tunisie.
A court terme, le Gouvernement doit obligatoirement résoudre les contraintes qui pèsent sur ces équilibres macroéconomiques et relancer la machine de l’investissement.
En dépit de ces risques, il est évident que la Tunisie a franchi une étape essentielle dans sa transition politique vers un régime démocratique et transparent et de ce point de vue, elle est devenue la seule réussite des Printemps arabes et une véritable démocratie en émergence.
Par ailleurs, Tunisie Valeurs parle d’une situation extérieure inquiétante. Nous assistons en effet depuis quelques années à une dérive du déficit courant du fait d’une progression des importations beaucoup plus rapide que celle des exportations et d’une baisse des opérations en capital et financières à partir de 2014 (après une évolution en dents de scie entre 2011 et 2014).
Le e déficit commercial est passé d’environ 8 milliards de dinars en 2010 à 15,5 milliards en 2017 aggravé par la dépréciation du Dinar. Le taux de couverture est passé de 74% à 69% dans le même intervalle. Le déficit commercial a mécaniquement amputé le solde de la balance courante qui a plus que doublé entre 2010 et 2017 (passant de 5% à 10,3%).
Traditionnellement, les revenus du tourisme permettaient de compenser - dans une certaine mesure - le déficit commercial. Mais, la dégradation de l’environnement sécuritaire a mis un terme à cette manne de devises et a entrainé un assèchement des recettes touristiques. Cette situation a clairement pesé sur les réserves en devises de la Banque Centrale qui sont passées sous le seuil fatidique de 90 jours d’importations posant le problème du nécessaire recours à des sources extérieures de financement, et donc, de l’augmentation de l’endettement.
L’intermédiaire en Bourse souligne aussi les finances publiques en souffrance, La résilience relative de l’économie tunisienne avant la Révolution s’est en grande partie adossée à la bonne santé des finances publiques jusque là. La situation des finances publiques se caractérisait à cette époque par un excédent budgétaire (si l’on considère le produit de la privatisation de 35% de Tunisie Telecom, réalisée en 2006 pour une valeur de 3 milliards de DT et qui n’a pas été comptabilisé dans le budget de l’Etat). Après la Révolution et le quasi arrêt des principaux moteurs de l’économie, les gouvernements qui se sont succédé ont opté pour une relance keynésienne (Stop and Go). Cette politique a eu un triple effet pervers : elle a creusé le déficit budgétaire, aggravé le déficit courant et alimenté les pressions inflationnistes.
« La politique de relance par la consommation entamée depuis 2011 a eu un triple effet pervers », note la rebue de Tunisie Valeurs. Plus précisément, l’augmentation des dépenses publiques s’est faite dans un contexte de tassement des recettes propres de l’Etat - et plus précisément les recettes fiscales. Celles-ci ne représentent aujourd’hui que 2/3 du Budget de l’Etat, contre 3/4 avant la Révolution, ce qui a nécessité un recours massif à l’endettement afin de combler le manque de ressources. Du côté des dépenses, l’élément le plus frappant a été l’explosion de la masse salariale. Celle-ci a plus que doublé par rapport à 2010, passant de 6,8 milliards de DT à près de 14,3 milliards de DT en 2017.
Sur le plan boursier, l’intermédiaire en Bourse parle d’un cru boursier qui dépasse toutes les attentes, malgré un coup de froid sur le marché primaire (aucune introduction en bourse ni augmentation de capital n’ont été constatées depuis le début de l’année), la capitalisation de la place a continué son trend haussier, atteignant un pic historique de 26,7 milliards de dinars. Le « phénomène bancaire » a été déterminant; le secteur ayant contribué à lui seul à près de 3 milliards de dinars. Un autre mastodonte de la cote a, également, tiré la capitalisation du marché vers le haut: la SFBT. Avec un bond de 41%, la brasserie a vu sa capitalisation gagner 1 milliard de dinars en l’espace de six mois.
Pour la quatrième année consécutive, le portefeuille type du bureau d’études a surperformé le marché. Notre sélection de valeurs proposée depuis le début de l’année a enregistré une performance appréciable de 29%. La question qui se pose aujourd’hui est de savoir si le marché pourrait poursuivre sur cette lancée ?
Tunisie Valeurs estime que l’évolution boursière du premier semestre pourrait être difficilement reproduite sur le reste de l’année. La décélération attendue de la croissance des bénéfices du secteur bancaire (+8% en 2018 contre +18% en 2017)* - poids lourd de la cote - laisse entrevoir un deuxième semestre de consolidation pour le marché. n Dans un climat économique pour le moins morose, (croissance molle, inflation persistante, dépréciation du dinar et assèchement des liquidités pour les banques), l’attitude des investisseurs devrait se traduire par un « flight to quality ». Ils devraient continuer à privilégier les valeurs de fonds de portefeuille qui affichent les fondamentaux les plus solides. Le stock picking reste donc le mot d’ordre.
Etant donné sa position dominante sur la bourse et sa valorisation encore attractive (un P/E 2018e de 10,1x et un P/B 2018e de 1,6x), le secteur bancaire resterait une thématique d’investissement attrayante. Notre choix porte sur les banques dont la marge d'intérêt est la plus favorable à la hausse des taux et qui affichent une bonne discipline prudentielle. BIAT, Attijari Bank, UIB et BT demeurent, à ce titre, nos actions favorites. n Vu le contexte économique contraignant et la montée du coût de la dette, les investisseurs devraient se tourner vers les valeurs défensives, capables de résister à des conditions de marché difficiles. Opérant dans les secteurs de grande consommation ou pharmaceutique, les titres SFBT, SAH Lilas, Délice Holding, UNIMED ou Céréalis offrent des spécificités intéressantes dans le contexte actuel d'incertitude: Leadership du marché, croissance récurrente et assise financière solide.
« Dans le contexte actuel, l’attitude des investisseurs devrait se traduire par un flight to quality : une préférence pour les valeurs de fonds de portefeuille »
Les valeurs exposées à l'Europe occupent, également, une place de choix dans notre sélection de titres. Avec leur profil exportateur et leur forte capacité génératrice de cash flow, One Tech Holding et Telnet Holding constituent de bons véhicules pour déjouer le glissement du dinar et "capter" la reprise en Europe. n Les valeurs industrielles jouissant d’un positionnement solide sur le marché local resteraient « sous surveillance ». Les majors industriels de la cote (SOTUVER, SOTIPAPIER, TPR et MPBS) pourraient profiter: 1) d’une meilleure compétitivité face aux produits importés en raison d’un dinar plus faible et 2) d’une « demande de substitution » qui pourrait naitre des restrictions croissantes aux importations imposées par l’Etat.
Tunisie Valeurs recommande une stratégie de stock picking axée sur les Blue Chips bancaires, les valeurs défensives et les valeurs tournées vers l’export.
S’agissant du secteur bancaire, l’intermédiaire en Bourse voit n une résistance salutaire dans un contexte économique et monétaire tendu, une courbe ascendante des résultats portée par la hausse des taux et par une meilleure diversification des revenus, un redressement continu des fondamentaux avec une gestion plus rigoureuse et une meilleure discipline prudentielle.
Tunisie Valeurs note également les efforts notables d’assainissement des portefeuilles et une restructuration en cours des banques publiques qui devraient se faire sentir sur les résultats, la valorisation intéressante, la position dominante sur le marché actions et une liquidité élevée des titres: un investissement incontournable en bourse.
L’intermédiaire en Bourse s’attend néanmoins à un ralentissement probable de la croissance, sur les deux prochaines années, mais un potentiel de rebond, à long terme, avec le rétablissement du climat des affaires. Le secteur reste un investissement incontournable en bourse, estime la revue.
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