L'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), a publié une étude d'évaluation consacrée à la Tunisie et son économie, élaborée au sein du département des affaires économiques et transmise au comité d'examen des situations économiques et des problèmes de développement avec la participation de représentant du gouvernement tunisien.
La Tunisie a connu de fortes avancées économiques et sociales au cours des dernières décennies et, plus récemment, une transition démocratique réussie. Le processus de convergence s’est néanmoins ralenti, du fait de la faiblesse de l’investissement depuis le début des années 2000, estime l'OCDE, qui souligne que les inégalités régionales et sur le marché du travail, ainsi que l'exacerbation des contraintes structurelles depuis 2010, accompagnés de problème de sécurités qui ont affecté le tourisme et le secteur minier. La forte hausse de l'emploi et des salaires dans le secteur publics ont soutenu la consommation privée mais l'activité économique et la création d'emploi dans le privé sont restées faibles. La hausse de la demande a parallèlement généré des tensions sur les prix et le compte courant, et le ratio des dettes publique et externe au PIB ont fortement augmenté.
Néanmoins dans son études, l'OCDE admet les fortes avancées dans les domaines politique, social et économique sur plusieurs décennies, les indicateurs de bien être, hormis l'emploi et les revenus sont plutôt élevé, font remarquer les auteurs de l'étude. Le processus de démocratisation, est certes allé de pair avec des changements fréquents au niveau du gouvernement, mais la continuité a pu être assurée grâce à la présence d'une administration bien formée, note le document, qui indique que les gouvernements successifs ont grosso modo partagé le même projet économique, avec un programme de réformes majeures.
Toutefois, et malgré le large consensus sur la nécessité de ses réformes, la mise en œuvre a buté sur des contraintes principalement liée à la fragmentation politique, et à la publication souvent tardive par l'exécutif des décrets d'application des lois adoptées par le parlement.
Parallèlement, l'OCDE cite les tensions régionales qui ont affecté l'investissement et le tourisme en Tunisie, ce qui s'est traduit par une hausse des dépenses militaires et de sécurité. Le document indique que la crise libyenne a couté à la croissance du PIB tunisien, un point de pourcentage en moyenne sur la période 2011-2015, selon les estimations de la Banque Mondiale publiées en 2017. La normalisation des situations interne et externe, permettra certes une reprise de la croissance et une amélioration de la balance des paiements ainsi que du solde budgétaire, mais restera insuffisante pour enclencher un rythme de croissance soutenu, réduire le chômage et inscrire la dette publique sur une trajectoire soutenable, poursuivent les auteurs.
Pour l'OCDE, la Tunisie pourrait mieux exploiter ses avantages comparatifs, dont la situation géographique et la main d'œuvre relativement bien formée. Le pays sera un partenaire essentiel pour la reconstruction de la Libye, et dispose d'une économie ouverte au commerce et aux investisseurs étrangers. Le document souligne certains pans de l'économie tunisienne qui se sont révélés particulièrement dynamiques, notamment dans l'offshore. En effet, le nombre d'entreprises dans ce secteur a été multiplié par 13 entre 1996 et 2016, alors que le nombre d'entreprises onshore a été multiplié seulement par 2. D'autre part, les sociétés offshore ont contribué à hauteur de 78%M dans les exportations hors énergie du pays, et de 34% dans l'emploi salarié formel en 2015. La production s'est diversifiée vers les produits plus complexes que la confection traditionnelle de textile, avec une progression des industries mécaniques et électriques. L'OCDE note à ce niveau, les perspectives de croissances très favorables à l'horizon 2025, prévisions estimées sur la base de la sophistication et de la diversification des biens produits (The Atlas of Economic Complexity). L'indicateur Bloomberg place la Tunisie comme premier pays africain et de la zone MENA, et au 38 éme rang mondial sur 200 pays en 2018. Pour concrétiser ces atouts, la Tunisie doit mettre en place les réformes destinées à libérer l'initiative privée et à mieux exploitation ses avantages comparatifs.
Ainsi, les messages principaux de la première étude économique de l'OCDE sur la Tunisie, concernent tout d'abord, le retour de la trajectoire de la dette publique à un niveau soutenable, qui nécessite d'associer l'assainissement budgétaire graduel à des réformes structurelles susceptibles de soutenir la croissance. Le taux de prélèvement étant déjà élevé, l'OCDE recommande de jouer sur le volume des dépenses publiques et de s'inscrire dans une perspective de moyen terme. La justice fiscale doit être renforcée et le biais des subventions en faveur des ménages riches doit être corrigé. L'organisation évoque également, la gouvernance des entreprises publiques qui doit être renforcées, et leurs performances financières qui doivent être améliorées.
Par ailleurs, et pour relancer l'activité économique et créer des emplois, l'OCDE recommande d'accélérer les réformes structurelles. La priorité devra être donnée à l'amélioration du climat des affaires dont les gains seront plus facilement réalisables que ceux de la modernisation du code du travail. Il s'agit selon l'OCDE, de lever les contraintes réglementaires, administratives et de financement que rencontrent les entreprises, et d'appliquer des règles du jeu équitables entre entreprises publiques et privées. L'ouverture à la concurrence devra aussi permettre de réduire les rentes de situation et d'accélérer la diffusion des nouvelles technologies. De meilleures performances logistiques et la facilitation du commerce extérieur devraient permettre d'attirer plus d'investissement étranger et de progresser davantage dans les chaines de valeurs mondiales. La prévisibilité de la réglementation, y compris fiscale, est aussi importante pour les investisseurs, souligne l'étude.
Enfin, la création d'emploi, et le développement régional sont les facteurs les plus importants pour rendre la croissance plus inclusive. Pour permettre la baisse du chômage et la création d'emploi de qualité, les cotisations sociales, pesant sur le travail salariés devront être allégées. Des politiques favorisant la participation sur le marché du travail et l'emploi des femmes, et à mieux les orienter vers des formations propices à l'emploi, devraient être mises en œuvre. L'OCDE prône également une nouvelle politique de développement régional, notamment par des mesures favorisant la mobilité des travailleurs, comme l'amélioration des infrastructures et des transports publics dans les régions isolées.
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