Mesures fiscales de la loi de finances pour la gestion de 2013: statu-quo fiscal et prévisions optimistes. (Par Anis WAHABI, Expert Comptable )

La loi de finances pour la gestion de 2013, promulguée le 29 décembre 2012, fixe le budget global de l’Etat à 26 692 000 dinars, financé à 67% par des recettes fiscales.

En absence de la version française de ladite loi, nous nous excusons pour d’éventuels écarts de traduction ou d’interprétation.

Il est clair que la présente loi de finance ne contient pas de nouveautés majeures ni dans la conception du système fiscal, ni dans l’utilisation de la fiscalité comme outil de relance économique et d’encouragement des efforts d’investissement et d’emploi.

I. EN MATIERE D’IMPOTS

Prorogation de la déduction totale des bénéfices ou revenus provenant de l’exportation :

L’application du régime définitif à l’exportation, portant sur l’imposition des bénéfices provenant de l’export au taux réduit d’IS de 10% et la déduction des 2/3 des revenus des personnes physiques provenant de l’export, est reportée au 1er janvier 2014.

Les investissements réalisés et entrés en activité avant le 1er Janvier 2014, continuent à bénéficier de la déduction totale des bénéfices ou des revenus provenant de l’exportation, pendant les 10 premières années d’activité. La déduction de 50% des bénéfices ou revenus au-delà de cette période sera maintenue jusqu’à l’entrée en vigueur du régime définitif à l’exportation.

Encouragement de la création des petites et moyennes entreprises :

La loi de finances pour l’année 2011 a exempté les PME, entreprises individuelles et sociétés, créées courant l’année 2013 de l’impôt sur les revenus ou l’impôt sur les sociétés, pour une période de 3 ans. Cette disposition concerne :

* les entreprises de service et de professions non commerciales réalisant un chiffre d’affaire ne dépassant pas 300 000 dinars par an :

* et les entreprises de commerce, d’industrie de transformation et de consommation sur place réalisant un chiffre d’affaire ne dépassant pas 600 000 dinars par an.

Déduction des dotations constituées par les banques au titre des provisions collectives pour couvrir les risques latents sur les engagements courants et les engagements nécessitant un suivi particulier (classe 1) :

Les dotations aux provisions sont désormais déductibles dans la limite de 1% du montant total de ces engagements.

Exonérations fiscales spécifiques dans le cadre du projet spécial de logements sociaux :

Les projets réalisés dans le cadre du projet spécial de logements sociaux bénéficient de :

* la réduction du taux d’enregistrement des contrats de transferts des logements sociaux au taux fixe de 20 dinars par contrat et l’exonération du droit dû pour non mention de l’origine de propriété s’élevant à 3%.

* Exonérations des revenus ou bénéfices réalisés par les projets de construction de logement sociaux, sans minimum d’impôt pour les projets réalisés dans les zones de développement régional et avec minimum d’impôt pour les projets réalisés dans les autres régions.

Prise en compte des déductions au titre des enfants infirmes et étudiant à charge dans le calcul de la retenue à la source sur IRPP :

Avant la présente loi de finance, seuls les déductions pour frais professionnels, enfants à charge et comptes épargne action étaient pris en compte dans le calcul de la retenue à la source sur l’IRPP.

Désormais, les déductions suivantes sont prises en charge également :

* 600 dinars par enfant poursuivant des études supérieures sans bénéfice de bourse et âgé de moins de 25 ans au 1er janvier de l'année d'imposition ;

* 1000 dinars par enfant infirme quelque soit son âge et son rang.

Augmentation du taux d’impôt sur la plus value immobilière :

Le taux d’impôt sur la plus value immobilière est de :

* 15% au titre des cessions réalisées au cours d’une période de 5 ans à partir de la date de possession ;

* 10% au titre des cessions réalisées au-delà d’une période de 5 ans à partir de la date de possession et des cessions de biens hérités quelle que soit la période de détention.

Instauration d’une redevance sur les revenus dépassant 20 000 dinars :

Cette redevance s’applique aux contribuables personnes physiques, soumises à tout régime d’imposition et réalisant un revenu net de 20 000 dinars. La redevance s’élève à 1% du revenu net sans dépasser 2 000 dinars annuellement et n’est pas déductible du revenu pour le calcul de l’impôt.

II. EN MATIERE DE RETENUE A LA SOURCE

Extension du mécanisme de retenue à la source aux contribuables selon le régime BNC forfait d’assiette :

Les contribuables personnes physiques soumis à l’impôt dans ce cadre de bénéfice non commercial, ayant opté pour le calcul d’impôt selon le régime de forfait d’assiette sont dorénavant soumis à l’obligation d’effectuer la retenue à la source sur les paiements d’honoraires, commissions, loyers, rémunération des activités non commerciales et d’acquisition de biens immobiliers ou de fonds de commerce.

Réinstauration du régime d’avance sur impôt pour les ventes aux forfaitaires :

La loi de finances a réinstauré le régime d’avance sur impôt de 1% sur les achats de marchandises effectués par les bénéficiaires du régime du forfait d’impôt, auprès des industriels et des commerçants grossistes. Cette disposition ne concerne pas les produits soumis au régime d’homologation des prix.

A rappeler que ce régime a été prévu par la loi de finances 2011 et annulé par la loi de finances suivante pour son impraticabilité.

III. EN MATIERE DE DROITS D’ENREGISTREMENT

Enregistrement des contrats de transfert des terres agricoles au profit des jeunes promoteurs au taux fixe :

Les contrats d'achat des terres agricoles par les techniciens agricoles et les jeunes agriculteurs ou pour l'acquisition des parts des co-indivisaires des promoteurs de projets agricoles dans une exploitation agricole constituant une unité économique, sont soumis au droit d’enregistrement au taux fixe de 20 dinars par page.

Augmentation des droits d’enregistrement des actes de constitution sociétés et de groupement d’intérêt économique :

Le droit d’enregistrement qui était de 100 dinars est élevé à 150 dinars par acte.

IV. EN MATIERE DE TAXES DIVERSES

Exonérations de la gratification de fin de service de la TFP et la FOPROLOS :

La gratification de fin de service, dans les limites fixées dans le cadre de la législation régissant le travail ou dans les limites des montants fixés dans le cadre des opérations de licenciement de salariés pour des raisons économiques et approuvées par la commission de contrôle des licenciements ou par l'inspection du travail ou fixées dans le cadre des décisions de la commission d'assainissement et de restructuration des entreprises à participations publiques, sont désormais exonérées de la TFP et la FOPROLOS.

Réduction du taux de la TCL appliquée sur les entreprises vendant des produits soumis au régime de l'homologation administrative des prix :

Le taux de la taxe sur les établissements à caractère industriel, commercial ou professionnel est fixé à 0.2% du chiffre d’affaires local TTC.
Les entreprises, dont le chiffre d’affaires provient, à 80% ou plus, de produits soumis au régime de l'homologation administrative des prix et réalisant une marge brute n’excédant pas 6%, ont le choix entre deux régimes :

* un taux de TCL de 0,1% basé sur le chiffre d’affaire local TTC ;

* un taux de 25% basé sur le montant de l’impôt dû au titre de l’année dernière (à l’instar des forfaitaires et des entreprises déficitaires).
Ces entreprises peuvent opter pour la deuxième alternative lors de la déclaration fiscale de janvier de chaque année.

Extension des avantages accordés aux tunisiens résidents à l’étranger :

Les tunisiens résidents à l’étranger bénéficient, outre les incitations prévues par le code d’incitations aux investissements, d’un avantage spécifique relatif à l’exonération des droits de douane et la suspension de la taxe sur la valeur ajoutée et du droit de consommation et autres taxes sur le chiffre d’affaires, dus à l'importation ou, dorénavant, à l’achat sur le marché local, des équipements et matériels agricoles nécessaires à leurs projets y compris un camion dont l'âge ne dépasse pas 7 ans, au lieu de 5 ans prévu avant.

Instauration d’une redevance sur les clubs de nuits, les restaurants, les cafés, les salons de thé et les pâtisseries :

Cette redevance est au taux de 1% du chiffre d’affaires mensuel hors taxes, appliquée aux contribuables soumis au régime d’imposition réel ou forfaitaire.

Instauration d’une redevance sur voiture de grande cylindrée :

Les premières immatriculations des voitures dont la cylindrée dépasse 2 litres essence ou 2,5 litres gasoil, sont soumises à une redevance de 5 000 dinars, à l’exception des voitures exploitées par les agences de voyage, les louages et taxis, les auto-écoles, les handicapés, les centres de dialyse, les diplomates et celles acquises dans le cadre du régime suspensif.

Instauration d’une redevance sur les nuitées d’hôtels :

Cette redevance est applicable à partir du 1er octobre 2013 et est de 2 dinars pour toute nuitée passé dans les hôtels tunisiens par tout client dépassant 12 ans d’âge.

V. AUTRES MESURES PROCEDURALES

Extension d’une année des délais d’utilisation des sommes disponibles chez les sociétés d’investissements :

Les sociétés d’investissement (SICAR et SICAF) et les OPCVM bénéficient d’une prorogation jusqu’au 31 décembre 2013, pour l’utilisation des sommes disponibles qui auraient dû être investies au 31 décembre 2012. Instauration d’une obligation de dépôt à l’administration fiscale d’une liste des factures d’achats et de vente en suspension de TVA :

Cette procédure doit se faire au plus tard le 28 du mois qui suit chaque trimestre, sur un support magnétique et selon un modèle qui sera communiqué par l’administration.

Renforcement des mesures de lutte contre l’évasion fiscale :

Le délai de prescription des poursuites des infractions fiscales pénales qui était de 3 ans à compter de la date de l’infraction est relevé à 5 ans pour les infractions engendrant des peines corporelles en plus des peines financières. Ces infractions concernent notamment les délits de fraude fiscale, malversation sur les factures, etc.

La prescription est interrompue, pour les infractions fiscales pénales, par la notification du procès-verbal constatant l’infraction.

Changement des procédures de transfert à l’étranger :

La loi de finance exempte de l’obligation de présenter un quitus fiscal, les opérations de transfert à l’étranger de revenus ou de bénéfices, au titre d’opérations exonérées de l’impôt, hors champs d’application de l’impôt, ayant subi la retenue à la source au taux légaux ou réalisées par des non résidents.

Compte tenu de la faible aptitude des banques tunisiennes à qualifier ces opérations, cette mesure visant à simplifier la procédure initiale se trouve très limitée.

Les Services de l’État, des collectivités locales, des entreprises et établissements publics sont tenus d'effectuer une retenue à la source au taux de 50 % sur le montant de la taxe sur la valeur ajoutée applicable aux montants égaux ou supérieurs à 1 000 dinars TTC, payés au titre de leurs acquisitions de marchandises, matériel, biens d'équipements et services.

La loi de finances 2013 ajoute à cette liste les acquisitions de biens immobiliers et de fonds de commerce.

Instauration d’une pénalité pour non apurement des bons de commande :

Le non apurement des bons de commande visés par les services de l’administration fiscale est soumis à une pénalité de :

* 2 000 dinars au titre de chaque bon de commande non apuré parmi les 5 premiers bons de commande ;

* 5 000 dinars au titre de chaque bon de commande non apuré au-delà des 5 premiers bons de commande.

Encouragement de recrutement des ouvriers de chantiers :

Tout recrutement d’un ouvrier de chantier enregistré au gouvernorat depuis 1 an au moins, bénéficie pendant 5 ans, de la prise en charge par l’Etat de 50% de son salaire (limité à 250 dinars), de la cotisation patronale à la sécurité sociale et d’une exonération de la TFP et la FOPROLOS.

Anis Wahabi, Expert comptable.

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